"Bonjour, je suis conseiller communal ici à Koekelberg..."

Je terminais aujourd'hui la distribution de mon matériel de campagne dans les boites koekelbergeoises, tout en discutant avec les habitants. 

Ma petite présentation y côtoiera donc les folders de la commune à propos des sanctions administratives communales. Ce qui ne tombe pas plus mal. Puisqu'on m'a parfois demandé "ce que nous faisions comme conseillers communaux, dans l'opposition? "

Et bien, outre corriger les erreurs factuelles que je relève dans le document officiel aujourd'hui dans les boites, ce que nous faisons, entre autre, ce sont des interventions comme celles-ci: 


Monsieur le Bourgmestre,
Mesdames et Messieurs les Echevins,
Chers Collègues,

Pour le groupe PS, le débat de ce soir est évidemment important. La principale modification qui nous est proposée dans le Reglement Général de Police – qui n’est pas seulement celui de la commune, mais également celui de toute la zone, un fait assez rare que pour être salué – cette modification, donc, n’est pas anodine. En ce qui concerne l’unification des règlements de police, je rappelle que la loi prévoit explicitement, dès son article 2, la possibilité pour les 19 communes de la Région d’adopter un RGP commun. Je regretterai évidemment que cette faculté n’ait pas été mise en œuvre, ne serait ce que pour des questions de sécurité juridique pour les usagers évoluant dans un environnement où les limites des zones ne sont pas plus marquées dans le paysage urbain que celles des communes. 

Il s’agit donc essentiellement d’abaisser l’âge des mineurs pouvant faire l’objet d’une sanction administrative de 16 à 14 ans. 

La liste de ce qui nous apparait comme autant d’obstacles à cette modification est longue. Je vais essayer de me montrer aussi synthétique que possible dans le développement de celle-ci .

1° ) Un obstacle de principe. Si le PS a voté au niveau fédéral la possibilité d’abaisser l’âge à 14 ans, il ne l’a fait précisément parce que ce n’était qu’une possibilité et en aucun cas une obligation. Il a d’ailleurs été particulièrement clair sur le fait qu’aucune commune dans lequel il exerçait des responsabilités ne ferait usage de cette option. Pour une raison simple : pour nous socialistes, la jeunesse ne peut pas continuer d’être stigmatisée comme elle l’est par des politiques telles que celles-ci. Il ne s’agit pas de la « nouvelle classe dangereuse » que certains agitent. La jeunesse commet des erreurs, c’est le propre de cet âge. Le rôle des pouvoirs publics est de les aider à s’en détourner, notamment par des mesures éducatives adaptées. La simple sanction financière n’en constitue pas une, même lorsqu’elle arrive en bout de procédure.

 Cet abaissement de l’âge, c’est aussi la négation d’années de progrès en matière de justice :  la convention internationale des droits de l’enfant le répète assez,  les mineurs ne peuvent, ni ne doivent, être soumis à une justice identique à celle des adultes. Ils doivent faire l’objet de mesures de protection particulières. Des mesures qui font défaut dans le projet ici. Or, il s’agit bien d’une question de justice, et pas de seule police. Le texte de loi est assez clair quant à l’esprit qui anime le législateur à ce sujet, puisqu’il prévoit notamment qu’un mineur soupçonné d’une infraction soumise à sanction administrative peut se faire assister d’un avocat (c’est l’article 16). Je regrette en passant que cette possibilité, qui impose également des obligations au service sanctionnateur en matière d’information vers le bâtonnier de l’ordre, ne soit pas reprise dans le règlement dont nous discutons. 

2°) Se pose la question de l’opportunité.
Elle se pose d’ailleurs suivant deux axes, essentiellement :
-          Le premier axe qui limite fortement la pertinence de cet abaissement de l’âge est le recours actuellement pendant devant le Conseil d’Etat, introduit par la coordination pour les droits de l’enfant mais également par rien moins que la Ligue des Droits de l’Homme, qui ne sont tout de même pas de gentils guignols en matière de droit. 
      Outre ce recours, on peut également contester ce texte sur une notion importante, celle selon laquelle la peine doit être exécutée par la personne condamnée. L’article 14 §1 de la loi suivant lequel les parents ou tuteurs du mineur contrevenant sont civilement responsable du paiement de l’amende est ainsi sérieusement attaqué puisqu’il énonce une responsabilité civile à l’endroit d’une sanction infligée pour des faits qui relèvent du pénal. Or, un mineur de moins de 16 ans n’a pas la capacité légale d’exercer une profession rémunérée, on voit donc mal comment il pourrait s’acquitter d’une amende administrative.
Il aurait été pour le moins pertinent de reporter l’adoption de cette mesure particulière au-delà de la décision du Conseil d’Etat, ce qui n’aurait pas empêché de nous présenter un RGP qui maintenait le seuil de l’âge des sanctions à 16 ans.

-          Le second axe est de nature plus locale. Si l’on en croit le rapport annuel 2013 voté récemment par ce Conseil, 19 infractions impliquant des mineurs ont été constatées au cours de l’année écoulée, dont seules 3 ont débouché sur des sanctions. Nous sommes donc là devant un effet d’annonce, qui n’améliorera en rien la qualité de vie des habitants de la commune. Au contraire, elle ne pourra être ressentie que comme vexatoire par l’importante population « jeune » de Koekelberg. 

3°) Se pose également des questions d’une nature beaucoup plus pragmatiques, mais qui n’en sont pas moins politiques, ne serait-ce que par leur implication budgétaire. En effet, les procédures qui doivent être mises en place dans le cadre d’une sanction des mineurs ont un coût pour les communes et pour les zones. Un coût que, la Ministre l’a répété notamment à l’occasion de la discussion de plusieurs amendements introduits entre autres par le FDF (représenté au sein de votre majorité), un coût donc que le fédéral n’entend pas compenser. Il n’y aura pas de subsides pour financer le surcroit de travail imposé notamment aux services de médiations. Il n’y aura pas non plus de subsides pour financer les frais de justice qu’entraineront les éventuels recours devant les tribunaux ou tribunaux de la jeunesse prévus par la loi. 

Au mieux annonce-t-elle que les rentrées générées par les amendes suffiront à couvrir les frais occasionnés. Il y a là, pour nous, un autre problème politique : cet état de fait est de nature à pousser les services à sanctionner à tout va, dans une optique de rentabilité. Nous ne pouvons y souscrire.
Les éventuels frais de justices ou de médiation ne sont pas les seuls à avoir un impact budgétaire en l’occurrence. C’est également le cas des peines alternatives, qui doivent, rappelons-le à toutes fins utiles, avoir une vocation pédagogique. En effet, la commune devra disposer d’une assurance couvrant les personnes exerçant de telles peines. Elle devra également leur fournir un matériel adéquat et adapté à leur morphologie. Ceci engendrera donc bien des frais supplémentaire. 

4°) On peut également ranger dans les questions pragmatiques, celle des agents constatateurs. Les infractions qui ne relèvent pas des infractions mixtes, c’est-à-dire celles qui peuvent uniquement faire l’objet d’une SAC, peuvent être constatées par des agents communaux. En l’occurrence, essentiellement des gardiens de la paix. Or ceux-ci doivent répondre aux exigences de formation reprise dans l’arrêté royal du 21 décembre 2013, dont je vous fais lecture.

Certes, cet arrêté permet aux agents habilités avant le 1er janvier 2014 de poursuivre leur mission. Toutefois, il nous semble totalement inconcevable que nous ne cherchions pas à mettre en conformité ces agents avec les exigences requises pour les nouveaux entrants éventuels. Dès lors je m’interroge quant au fait que les agents actuellement habilités répondent effectivement à ces exigences de formation.

5°) En ce qui concerne toujours le constat, je remarque que la loi autorise les constatateurs à relever l’identité des contrevenants. Ici aussi l’abaissement de l’âge est un problème manifeste. En effet, le port de la carte d’identité n’est obligatoire dans ce pays qu’à partir de 16 ans. On peut donc s’interroger sur les moyens qui pourront être mis en œuvre pour effectivement procéder à ce contrôle d’identité auprès de mineurs agés de moins de 16 ans !

6°) Nous nous inquiétons encore de la façon dont sera tenu le registre des SAC prévu à l’article 44 de la loi. Celui-ci doit être tenu par le fonctionnaire sanctionnateur, à savoir dans notre cas, si j’ai bien compris, le secrétaire communal. C’est évidemment une vue de l’esprit que de considérer que M. De GRENDELE sera celui qui tiendra physiquement ce registre. Nous nous interrogeons donc sur les services qui le tiendront effectivement et sur les garanties de confidentialité qui protègeront ceux qui y apparaissent. De la même manière, nous nous demandons ce qu’il en sera des garanties de la destruction de ces données au terme de 5 ans ou de leur anonymisation.

7°) Au-delà de ces remarques, je tiens également à vous faire part de notre étonnement de ne pas avoir reçu, en même temps que le RGP, une série de documents pourtant requis. Le premier, c’est l’avis du Conseil de la Zone, lequel doit avoir été pris avant que ne se prononce le Conseil, conformément à l’article 2 §2. C’est un document qui est pourtant de nature à éclairer le Conseil.
Le second porte sur les infractions mixtes. Il s’agit du protocole d’accord qui peut être signé entre le procureur du Roi et le Collège. Il s’agit également d’un document important, au point que l’article 23 exige que ce protocole soit annexé au reglement de Police. Je ne l’y retrouve pas, c’est regrettable.
Le troisième concerne l’avis visé à l’article 4 §5 à savoir celui de l’organe ayant une compétence d’avis en matière de jeunesse. Cet avis a bien été recueilli auprès du conseil consultatif ad hoc. Pourquoi n’est-il pas joint au dossier ?

Pour ces nombreuses raisons, Monsieur le Bourgmestre, Mesdames et Messieurs les Echevins, Chers Collègues, mon groupe ne votera pas ce Règlement.

Brêve de campagne

Un hall d'immeuble - Intérieur Jour.

Un jeune homme propre sur lui entre, un paquet d'enveloppes blanches à la main. 

- Moi, dans un sourire: "Tiens, voila la concurrence ! "

- Lui: "Bah oui. Mais vous ne m'avez pas demandé quelle concurrence."
- C'est juste. Et donc?
- Je suis candidat. [ici, sa place sur la liste]. Ca fait 4 générations qu'on est mandataires politiques dans la famille. Libéraux. 
- Ah oui? Et c'est votre tract que vous distibuez?
- Ben oui, je ne ferais pas ça pour quelqu'un d'autre, hein! C'est pas le vôtre? Vous n'êtes pas candidat?
- Je le suis. Mais c'est un tract fédéral. Chez nous, on se bat en équipe. 
- Ah...


Comment peut-on être de droite à 20 ans?
Je crois qu'il y a des éléments de réponse dans cette brêve rencontre...

Des hauts... et débats.

Plus qu'une semaine avant le scrutin. 

Ce n'est évidemment pas le moment pour tirer des conclusions, au contraire, c'est plus que jamais "le nez dans le guidon", donner tout ce qu'il reste de force de conviction et d'énergie pour aller chercher chaque citoyen et lui expliquer les enjeux du scrutin, les différences entre les programmes des différents partis... parfois, plus fondamentalement simplement rappeler l'utilité du vote.

Etre sur le terrain, c'est souvent les montagnes russes. Les rencontres sont de tous les genres, ce qui fait qu'on peut se sentir porté par l'enthousiasme d'une rencontre et anéanti par la dureté de la suivante.
Etre militant en général, c'est évidemment s'exposer à ces fluctuations, accepter de se faire engueuler, essayer de faire la part des choses, parvenir à ne pas prendre ça personnellement, réfléchir au "pourquoi" de son engagement et repartir de l'avant. 


Exemple du jour. 

Aujourd'hui, donc, rendez-vous place Rouppe avec plusieurs camarades à 9h30 : la Fédération avait besoin de troupes pour distribuer un tract (qui déchire sa maman, si vous me passez l'expression, mais on va encore dire que je ne suis pas objectif) reprenant à la fois le bilan des socialistes au gouvernement et les axes prioritaires de notre programme au fédéral. 

Avant de défendre ma seule candidature, je me bats pour la victoire du collectif. Donc, hop, en avant, c'est parti pour la distribution du tract de la fédé. Bon, je me charge de mes tracts à moi aussi (tout de même...). On s'est vu attribuer le territoire d'une commune du Nord Ouest, ce sont des voisins. 
Et puis 9h30, ça me laisse largement le temps d'aller répondre à l'offre d'un ami qui me propose de coller une affiche sur son garage avenue Brugmann. 

Bref, je vous passe les détails, première boite aux lettres, la porte s'ouvre. Un monsieur d'un âge euh.... d'un certain âge. "Ah, vous vous présentez? Oh de toute façon vous n'avez aucune chance, c'est un patelin de dingues ici...". 
Arf... bon, ça commence bien, on ne se démonte pas, on discute quelques minutes, on échange, sur le quartier, les propositions qui le touchent, etc.... "ah oui, et bien écoutez, bonne chance vous en aurez besoin". Merci monsieur et belle journée...

On reprend la route, autres immeubles, autres personnes croisées plus ou moins ouverte à échanger un peu plus qu'un "bonjour". Et puis dans un hall d'entrée: "ah monsieur, vous videz votre boite, je peux vous parler un instant de ce que j'allais y mettre?" "Quoi? Ah non, vous êtes tous des voleurs !" "ben pourquoi vous dites ça?" et reviennent les mythes diffusés par l'extrême droite, sur les prétendus 18.000 € de salaire mensuel des euro-députés (en fait, une enveloppe qui sert à payer les salaires des collaborateurs parlementaires, les frais d'études complémentaires si un député veut faire approfondir un sujet par un expert ou une université, qui couvrent les frais de mission,.... tout ce qu'on veut sauf un salaire, quoi). Puis les impôts, et toute la litanie. On ne se démonte pas, on répond à chaque cliché véhiculé par les cliques les moins fréquentables, on montre ce qui est fait, ce qu'il reste à faire... "et les accises sur l'essence? il la paye sans doute, les députés européens?" "ben.... ils font le plein à la pompe, comme tout le monde..." "AU REVOIR!" ...
On ne peut pas convaincre tout le monde, c'est comme ça...

Ah tiens, je ne suis pas encore allé voir où nous en sommes sur un autre terrain de campagne permanente, encore. Que dit Facebook aujourd'hui? Ah... que je suis le candidat le plus pénible suivant trucmuche. Ok, restons zen. Non, non, rien de perso, là-dedans. Où en étais-je dans mes boites aux lettres? Voila. "Non, pas chez moi, la NV-A j'en ai déjà beaucoup trop". "Je suis bien d'accord avec vous monsieur, de la NV-A on en a toujours beaucoup trop. D'ailleurs, je viens vous parler du bilan gouvernemental des socialistes". "Moi monsieur, je suis architecte et anarchiste". Alors toi, mon vieux, je sais déjà que je ne te convaincrai de rien du tout, mais par contre, je sens qu'on va avoir une discussion intéressante. Ca n'a pas raté. 20 minutes devant sa porte, à échanger sur les mérites comparés du mandat impératif ou du referendum, sur les limites posées par les disparités sociales au bon fonctionnement d'une démocratie directe, sur le parcours de Louise Michel... "Non, mais c'est bien ce que tu dis, mais dans 5 ans tu seras obligatoirement corrompu parce que c'est inévitable. Allez, salut!" claquement de portière, mon architecte file à bord de son 4x4 vers quelque important chantier, sur un argument d'autorité qui te fait penser que finalement, "misère de la philosophie", c'était un peu vache comme titre, mais c'était bien senti. 

Allez, je n'aurai pas ramené une voix à la gauche avec celui-ci, mais je ne pourrai pas dire qu'il n'avait pas envie de parler politique. Où en est-on sur le front numérique? "Non mais c'est normal quand on tracte pour la première fois et qu'en plus on rencontre des "vrais" gens qu'on veuille garder un souvenir". Nom d'un chien, être de toutes les campagnes depuis pfff.... 12 ans au moins, sans compter celle "d'avant", avoir diffé des tracts par tous les temps et pour toutes les occasions, avoir discuté des centaines et des centaines d'heures avec je sais pas combien de citoyens à toute heure du jour ou de la nuit, pour finalement lire un truc pareil... Respire à fond, Brian, ce type n'a pas la moindre idée de ton parcours et il s'en tape, c'est important de pouvoir faire un bon mot de temps en temps quand il vous vient à la bouche. Passons...

Et comme ça, avec des hauts, des bats et parfois des débats, jusque vers 17h00. Et là....
Tu ne payais pas de mine, sur le pas de la porte de ta petite maison sociale. Dans une des cités jardins qui a le plus souffert du désinvestissement public dans les années 80 (et je ne parle même pas de soucis de gestion réels par la suite). En train de nourrir le chat du quartier, je suppose. Je te décrirais bien comme je t'ai vue, avec tes... quoi? 70 balais ? ... ton accent du sud et ton air un peu fermé vis-à-vis de ce type qui marche vers toi avec son écharpe sur la tête pour se protéger du soleil. 

"Bonjour Madame, je peux vous déranger une petite minute?" "ah ben vous avez de la chance qu'il est de mon parti ce tract là, sinon je vous l'aurais pas pris hein. C'est le parti des ouvriers, et moi je suis ouvrière."

Tu ne liras sans doute jamais ça, camarade, mais j'en aurais pleuré. 
Merde. 

On rencontre de tout en campagne. Des déçus. Des aigris. Des gens qui profitent d'une rencontre de passage pour vous déverser sur la tête tout ce qu'ils ont sur le coeur. Des gens accueillants, convaincus ou simplement polis. Des gars qui ont besoin d'un conseil. Des gamins qui vous expliquent leur quartier.
Un peu tous les visages de Bruxelles. Avec ce qui lui fait une belle petite gueule d'amour ou la sale tronche des lendemains de veille qui ressemblent déjà trop à la veille du jour d'avant. 

"Courage, hein, Monsieur, faut continuer de se battre!"


Promis



Et il faut trouver un titre, en plus?

Je n'avais pas particulièrement l'intention de parler de flics ou de confrontation de rue aujourd'hui. Mais moi qui me plaignait de l'absence de politique dans cette campagne, l'actualité force un peu la main. Et suite à ce statut, je me suis engagé à exposer une série de choses par ce biais.

Je n'ai qu'une parole, donc on va revenir sur les événements de hier matin autour et alentours du Palais de Justice, en essayant d'élargir le champ de la réflexion.

Résumé des épisodes précédents. Se tenait ce matin un de ces sommets dont le patronat européen à le secret et qui a le don d'énerver un paquet de gens (dont moi). Deux jours de séminaires où tout ce qui compte (ou voudrait compter) de patrons de grosses boites discutent le bout de gras et boivent des coups avec une série de responsables politiques, de hauts fonctionnaires, de conseillers d'institutions internationales... bref, une activité de lobbying qui pousse l'arrogance jusqu'à affirmer sur son site web qu'ils "forgent l'avenir de l'Europe". En l'occurrence, l'avenir au menu des discussions, c'était notamment le traité transatlantique TTIP

Comme, fort heureusement, il n'est pas question de laisser ces gens décider tout seul de ce que doit être notre avenir commun, surtout à 10 jours d'une élection européenne, une plateforme regroupant des associations d'horizons divers a lancé un appel à la manifestation contre le projet.
Comme de coutume, contact a été pris avec les autorités de la Ville, un parcours a été négocié et acté par les deux parties, l'autorisation est délivrée, bonsoir monsieur, bonsoir madame, rendez-vous le 16 mai. Jusque là, tout va bien.

Sauf qu'apparemment, très vite, ce matin, tout ne va plus si bien que ça. Le cortège "sort des clous", l'important dispositif mis en place passe à l'action sans retenue... 250 types en détention administrative, parmi lesquels des militants, des élus, des citoyens engagés... "un peu de tout", si on veut.

Bon. voila pour la synthèse.

Maintenant, les réflexions, dont je précise encore qu'elles dépassent assez largement le cadre du cas particulier qui a amené à la rédaction du présent billet.

Primo, coté "forces de l'ordre". Commençons par là, c'est encore ce qu'il y a de plus facile. Il y a un problème du coté de la police de Bruxelles. Ce n'est pas un scoop. N'importe qui ayant participé de près ou de loin à l'organisation d'une manif peut le dire et ça ne date pas d'hier.
Le responsable opérationnel sur ce genre d'événements est un spécialiste de la provocation gratuite. La formation des jeunes recrues est manifestement insuffisante et, par dessus le marché, j'entends dire que, depuis un moment, les agents les plus expérimentés ont été mis de coté et ne sont donc plus là pour encadrer les nouveaux.

Quand on est le seul dépositaire de l'usage légal de la force, on a évidemment toujours la plus grande part de responsabilité dans son usage et dans la mesure avec laquelle on la déploie. En ce qui concerne l'importance du dispositif, rappelons-nous que ce n'est pas le politique qui a la main, mais le responsable opérationnel. Si pour une raison ou une autre, ça tourne mal et qu'il apparait que le dispositif n'était pas à la hauteur de l'évènement, c'est sa responsabilité pénale qui est engagée. Ca ne veut pas dire pour autant qu'il faut sortir les bazookas pour chasser une taupe, mais ça peut servir à certains pour justifier d'un déploiement de forces qui, à titre personnel, me semble déjà être une provocation en soi. 

Il n'empêche que, en bout de course, la responsabilité politique est assumée par le président de la zone de police. 
Mais pour pouvoir assumer cette responsabilité politique, il faut aussi les moyens de la sanction. Or, il est difficile pour les autorités politiques de prendre des sanctions disciplinaires rapides à l'égard d'un responsable policier ayant fait l'objet d'une plainte, parce que celle-ci doit d'abord aboutir en justice avant que la sanction ne puisse être effectivement prise. 
C'est à la fois la force et la faiblesse du statut des fonctionnaires de police. Ni plus ni moins que n'importe quel autre citoyen, on doit leur garantir le droit à la défense. Et il me parait plutôt sein qu'un licenciement ne puisse pas avoir lieu sur la seule base d'une décision politique non plus. Mais quand le niveau de protection, lié à l'encombrement des parquets, donne le sentiment d'impunité à certains, il faut donner les moyens au responsable politique de prendre des mesures efficaces et rapides. 
S'il s'est trouvé une majorité pour voter une extension des Sanctions Administratives Communales sur le principe de ce constat, il doit pouvoir s'en trouver une aussi pour renforcer les moyens de lutter contre les dérives du coté de la police.



Secundo, et c'est là que pour certains il devient plus difficile de me suivre, il y a tout de même un coté "organisateurs et manifestants" dans ces histoires, que nous devons aussi être capables d'envisager comme militants et comme responsables de toutes natures.

Cela fait un moment maintenant que les rapports sociaux se tendent. Et, par voie de conséquence, que les mouvements se durcissent, dans certains groupes en particulier. Honnêtement, ça ne me pose pas de problème fondamental. J'ai beau être pacifiste, ça ne m'empêche pas de considérer que la violence est un fait social et qu'elle fait partie du processus historique. Dans certaines conditions historiques, elle peut même devenir nécessaire. Mais ces conditions ne sont pas remplies aujourd'hui, à mon avis. 

Etre organisateur d'une manifestation, c'est aussi une responsabilité lourde. Celle de la sécurité des gens que nous appelons à manifester pour commencer. Ca passe notamment par la demande d'autorisation de manif et le respect du parcours négocié. Et je ne nie certainement pas que certains parcours imposés sont des provocations en soi. Je ne suis pas près d'oublier D14. Ca passe aussi par la prise de mesure visant à encadrer sa manif pour éviter de répondre aux provocations et les débordements.

Pourquoi? 

Parce qu'aussi convaincus que nous soyons de la justesse des positions que nous défendons dans le cadre d'une manifestation, on reste dans le partage de l'espace public. Que l'on soit dans la démonstration de force ou dans l'action symbolique, notre liberté d'expression est limitée par la défense de la liberté de l'autre (poke Rosa Luxembourg), en l'occurrence celle de jouir de l'espace public aussi. 

En fait, c'est tout simplement une question de contrat social. 

Alors partant de là, je peux tout à fait entendre que certains veulent remettre en cause ce contrat social, qui ne manque pas de faiblesses et charrie son lot d'injustices quasi structurelles, par la voie de l'action directe. Après tout, la conquête de droits se fait dans le rapport de forces aussi, je le répète à qui veut l'entendre.
Mais c'est aussi une question d'assumer ses responsabilités et de cohérence. On ne peut pas à la fois refuser les règles du jeu, parce qu'on les considère illégitimes, et se considérer comme victime du caractère répressif d'un cadre dont on s'exclut, à mon humble avis.

Par ailleurs, il y a une autre question de cohérence qui se pose avec une certaine urgence. Peut-on à la fois s'autoriser, sûrs de notre légitimité, à passer outre le cadre en attendant la passivité des pouvoirs publics, et en même temps attendre des mêmes pouvoirs publics qu'ils tombent avec toute la force dont il dispose sur des groupes qui affirment des thèses diamétralement opposées aux nôtres?

Voila. Quelques réflexions en vrac, qui malgré leur formulation sans doute un peu maladroite, sont des sujets sur lesquels on doit pouvoir débattre sereinement. C'est un état de ma réflexion à ce stade - et je poursuis ma révolution permanente interne sur le sujet.  Les échanges sont toujours les bienvenus pour la faire avancer...




Groupons nous et demain...

Histoire de changer un peu, je ne partirai pas d'une réflexion née de la journée de campagne (même si, entre les réponses à donner aux camarades qui me sollicitent sur des dossiers qui relèvent de matières que je suis pour le groupe socialiste à la Chambre, le porte à porte de cet après midi dans le haut de Koekelberg, l'exposition photo de Yasmina Mechenouai à Ixelles et une rencontre avec les militants de la section bruxelloise du Labour Party britannique, je pourrais...)


Non, cette fois-ci, j'anticipe un peu sur la journée de demain : au menu, à coté d'une grosse distribution, je prendrai part à une journée de travail de la Coordination Nationale d'Action pour la Paix et la Démocratie (CNAPD pour les intimes dont vous faites désormais partie, amis lecteurs). Journée dédiée à l'inscription dans le territoire des discriminations sociales de tout ordre, qui abordera entre autres la question du logement.




La CNAPD, je l'ai présidée pendant un moment. J'y ai mené des combats indissociables du socialisme tel que je le conçois.

Je ne suis pas le seul dans le cas. Nous sommes 4 anciens présidents de cette plateforme sur les listes PS. Pour résumer ce que représente encore aujourd'hui notre engagement à sa tête, nous avons d'ailleurs fait le petit tract électronique commun que je vous livre ci-dessous. N'hésitez pas à faire tourner!


Nous avons eu la chance d’assumer d’importantes responsabilités dans le mouvement de la paix. Nous avons eu la confiance des diverses composantes de la CNAPD, une plate-forme pluraliste active dans différents champs de la paix et de la citoyenneté, pour y exercer la fonction de président. Cet engagement a constitué l’une des périodes les plus enrichissantes de notre parcours militant a tous les quatre.
Aujourd’hui, nous gardons encore bien ancrées en nous les convictions généreuses qui se sont façonnées et fortifiés tout au long de notre investissement dans cette organisation. Engagés à présent dans une campagne électorale, c’est tout naturellement que nous porterons les idéaux de paix et de démocratie et qu’humblement nous tenterons de les mettre à l’agenda politique."

Hommage aux mineurs turcs...

Avec le nez dans le guidon, j'apprends seulement maintenant le drame qui s'est joué en Turquie.



J'enrage à l'idée que des évènements comme celui-ci peuvent encore se passer au 21ème siècle, si près de chez nous.



En guise de soutien et de sympathie à tous ceux qui ont été touchés, cette belle chanson des Bee Gees, qui évoque un accident minier similaire dans l'Etat de New York et a été écrite en pensant d'abord aux mineurs du Pays de Galles.

C'aurait aussi bien pu l'être pour ceux du borinage, du limbourg ou de n'importe où...


La vache qui, le couteau entre les dents, regarde passer les trains .

Le souci avec des journées de campagne aussi riches, c'est qu'elles apportent à peu près 15 sujets de note par jour. 

Exemple au hasard: aujourd'hui, après la distribution matinale devant la station Simonis avec mon camarade et ami Yonnec Polet, le plus clair de mon temps aura été consacré à des questions d'asile et d'immigration. La soirée a, quant à elle, pris un tour plus européen, avec une réunion d'appartement (80 personnes tout de même... la classe) dédiée aux élections européennes. Paf, deux sujets.
Pendant ce temps là, Paul Magnette débattait avec Bart De Wever. Je suis sans doute un des seuls socialistes de la Région à l'avoir raté - pourtant ça vaut bien une note aussi. 

 Et puis, il y a tout de même un sujet qui revient périodiquement dans cette campagne, moins souvent que les avions, mais tout de même, c'est le PTB. 

Aaaaaah! Le PTB! Sujet inépuisable, hochet des droitiers de tous poils, petit ovni de campagne qui vient toujours meubler utilement un article ou l'autre. Mais aussi (et pourquoi pas?) option électorale pour certains qui, me sachant parfois un peu radical, me demandent ce que j'en pense. 

LA sensation du moment. Dans les sondages, le dangereux gauchiste reviendrait hanter la nuit du bourgeois et, faut-il croire, celle des traitres social-démocrates. Quand je lis la presse, surtout celle des traitres social-démocrates, d'ailleurs.
Et hop, au quart de tour, d'un bout à l'autre de l'échiquier politique, on brandit indifféremment la Corée du Nord, la Chine de Mao, la Russie de Staline, (insérez ici un pays de votre choix et la figure dictatoriale que vous y associez) pour dire à quel point ces gens là sont infréquentables.

Ce que j'en pense?  Ca me fait doucement rigoler. Voila ce que j'en pense.

Certes, la transparence n'est pas la vertu première de cette organisation politique. Plusieurs couacs dans la campagne ont également montré qu'on n'y plaisante pas avec la discipline interne. Et la surprise de voir Christian Panier défendre la mémoire de Léopold III me choque profondément (comme historien et comme militant socialiste). 

En attendant, je l'ai déjà dit ici, je n'ai pas d'ennemi dans la gauche radicale. J'ai un grand respect humain pour l'engagement des militants dans ces structures. J'y trouve même une ou deux personnes avec lesquelles la conversation est enrichissante et fructueuse. De toute façon, mon premier adversaire, il est à chercher à droite.

Mais ça me fait doucement rigoler. Sur l'analyse, je suis prêt à adhérer à 90% à leur vision des crises que nous traversons. D'ailleurs, je retrouve dans ce que je peux lire ici et là des accents de ce que nous disions déjà il y a 10 ans avec les Jeunes Socialistes bruxellois et dont nous n'avons pas dévié. 

Au cours du dernier mois, j'ai assisté à plusieurs débats auxquels participait leur tête de liste régionale. Si son discours fait froid dans le dos à certains, je leur recommande de rallumer leur chaudière: il n'y a rien là-dedans qui le différencie de ce que peut dire n'importe quel membre d'une sensibilité de gauche du PS. Ce que j'ai pu entendre, si on le met à coté du fameux discours de Mitterrand à Epinay, c'est aussi révolutionnaire qu'une conversation mondaine à la table d'Albert Frère. 

Sur le fond, si on met de coté les aspects "yaka - faucon", je vois des propositions qui rejoignent celles du Parti Socialiste. Notamment en matière de justice fiscale. 

Donc, ça me fait doucement rigoler. L'ours rouge autoproclamé et médiatiquement encensé n'a pas d'aussi longues griffes qu'il le dit.

Alors pourquoi pas voter PTB, plutôt que socialiste?

A mon sens, pour 2 raisons essentielles: 

  1. Ils ne veulent pas faire autre chose que de l'opposition. En dépit de virages sur l'aile plus ou moins assumés, le fait est que le PTB n'est pas près à entrer dans une coalition. Ca peut se comprendre: pas évident de garder les mains pures et sans tache quand on les met dans le cambouis. Etre dans l'opposition, ce n'est pas une honte. Ca arrive à tous les partis à différents moments de leur histoire. Mais dire dès le départ que sa seule ambition, c'est de rester sur le bord de la route et d'aboyer contre tout ce qui passe, de refuser toute prise de responsabilité... C'est de la force de frappe perdue tant pour la défense des droits sociaux que pour la mise en oeuvre d'une quelconque conquête. Je ne dirais pas la même chose si leur ligne était réellement celle du Front Populaire, comme certains le disent volontiers.  A ce stade, ils en sont encore à la ligne Classe contre Classe.
  2. Ils font cause commune avec au moins une liste réactionnaire. Pour se garantir d'atteindre le seuil électoral de 5%, le PTB a conclu un accord technique de "groupement de listes" avec d'autres "petits partis", parmi lesquels "Belgique Unie". Au sein de ce groupement, les sièges obtenus sont répartis suivant une clé d'Hondt. Voter pour le PTB, c'est donc aussi, indirectement, voter pour ce parti et son programme de réduction massive et linéaire des cotisations sociales et lui donner de bonnes chances d'obtenir un député régional. Bonjour la cohérence. 

Voila, ami lecteur tenté par ce vote, le 25 mai, tu feras encore bien ce que tu veux, par conviction ou par défoulement. Mais au moment de poser ton crayon sur le magnifique écran tactile de ton bureau de vote, pense tout de même à ça: une vache peut avoir autant de couteaux qu'elle veut entre les dents, elle n'actionne pas l'aiguillage. Elle se contente de regarder passer le train.